D'où vient l'ingéniosité militaire vietnamienne, et le sens tactique historiquement si singulier de ce peuple ? Eléments de réponse dans un nouveau livre paru chez L'Harmattan : "Histoire d'une grande famille vietnamienne, Madame Kien et les siens". 

Le génie militaire vietnamien provient de 20 siècles de résistance aux agressions extérieures, combiné au pragmatisme confucéen, à une ingéniosité constante et à un sens de l’effort collectif très développé. Ajoutons à cette liste un art du camouflage poussé à l’extrême, à tel point que les soldats vietnamiens, insaisissables, passaient parfois pour des fantômes aux yeux de leurs envahisseurs. Au XXe siècle, le pays fut vainqueur de trois conflits asymétriques successifs, contre trois super-puissances : la France, les Etats-Unis, puis la Chine (guerre-éclair de 1979). (...)  

Heurts et sentences du Vietnam médiéval

(...) au XIIIe siècle, les Vietnamiens étaient parvenus à mettre en échec trois invasions mongoles, à une époque où ces derniers contrôlaient un empire s’étendant du fin-fond des steppes à l’Europe. L’exploit n’était pas mince, bien qu’il fut assorti de conditions sonnantes et trébuchantes. Plus profondément, le génie militaire vietnamien dépend d’une intelligence tactique dont le général Giáp n’est pas le seul représentant : le grand maître militaire du Moyen Âge, Trần Hứng Đaọ, avait rédigé un traité de la guerre que certains pourraient estimer supérieur à celui de Sun Tzu, mondialement plébiscité.

Par son haut sens tactique, il était parvenu à détruire une immense flotte mongole lors de la troisième invasion du Việt Nam par les hommes des steppes : cet exploit militaire eut lieu en 1288 lors de l’incroyable bataille de Bạch Đằng : en jouant minutieusement sur le flux des marées, il avait fait installer des pieux sous l’eau pour éventrer les vaisseaux des envahisseurs. Au cours de la débandade, le reste des navires mongols avait été incendié par des archers qui tiraient leurs flèches enflammées depuis de frêles pirogues. Déjà, en cette fin de XIIIe siècle, le Việt Nam avait vaincu la première puissance mondiale.. 

Au sein d’un texte qu’il avait rédigé à l’adresse de ses officiers, le général s’était montré explicite : 

“Si vous échouez dans l’étude de mes enseignements et si vous ignorez mon conseil, vous deviendrez mes ennemis”  

“Si vous refusez de vous battre contre les Mongols en lavant la honte nationale (…) vos noms seront déshonorés pour toujours”  

L’écho terrible de ces phrases semble être remonté des profondeurs médiévales jusqu’aux (...) années 1960.   

Le saviez-vous?

En 1627, le grand jésuite Alexandre de Rhodes observait que les Vietnamiens du Sud étaient de bien meilleurs soldats que les Chinois, et cependant moins orgueilleux que ces derniers. 

Pour aller plus loin :

Histoire d'une grande famille vietnamienne, Madame Kien et les siens, L'Harmattan, 2022

Medievalreporter

Pierre-André Bizien

Crédit: inconnu actuellement